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PLUS ON EN PARLE MOINS ON EN FAIT Cheikh Tijaane Sow

Ce livre délivre une trajectoire de vie, dans laquelle à une moindre mesure, je peux m’identifier un peu, bien que sans l’avoir prévu je sois arrivée très tardivement à l’animation de métier et à la présidence d’association. Tous les questionnements, les réflexions, les conduites de projets grands ou petits et les actions visant à une justice sociale, un partenariat efficace dans un milieu donné, tout cela est parfaitement exploré, décortiqué, analysé dans ce petit ouvrage. J’ai souri plusieurs fois en lisant tel ou tel passage car ce vécu, même s’il naît dans un autre pays, le Sénégal, avec d’autres paramètres sociaux et politiques, fait qu’on reconnaît parfaitement certaines ficelles, méthodes et autres rouages du système en général. C’est un livre intelligent qui ne manque pas d’esprit et à la fois bien écrit. Il démontre également que nos pays européens n’ont pas le monopole de l’expérience et du savoir faire en matière de démocratie participative. On découvre au fil des pages une personnalité forte avec un regard affuté sur un parcours, une recherche ambitieuse au service du rapprochement des hommes, des communautés et qui parle à chacun de nous. C’est une petite « bible » pour la petite animatrice de terrain que je suis, il m’offre des pistes à repenser et à développer avec plus de rigueur et il me conforte aussi dans quelques voies que j’ai choisies d’entreprendre. Un livre nécessaire à lire.

Marie-Hélène

Roman ? Manuel ? Essai ? L’ouvrage que nous livre Cheikh Sow, militant d’éducation populaire, formateur en communication interculturelle et démarches participatives, est tout à la fois. Animée par les engagements de l’auteur autour des questions de la participation, l’approche romanesque est organisée en deux parties.
La première est tournée vers le passé du personnage central, Arfang qui, de retour d’une soirée débat organisée dans un centre social, se remémore ses origines africaines, sénégalaises, et plus précisément son éveil à une conscience politique, peu à peu construite par ses engagements militants au cours de sa période lycéenne et estudiantine, par sa participation active à la vie d’une association sportive et culturelle de quartier, par son amour et sa pratique des activités culturelles, par l’organisation de causeries et conférences-débats, par la diffusion de pièces de théâtre ressuscitant ou réhabilitant la mémoire de héros des résistances africaines, par les lectures aussi et entres-autres celles du Théâtre de l’opprimé d’Augusto Boal et du Manuel de l’animateur social de Saul Alinsky. Les expériences africaines d’Arfang construisent ainsi son identité complexe et forgent ses convictions en termes de capacitation, de participation. Il n’en reste pas moins conscient des limites, voire des travers que comporte l’usage de ces mots, des risques potentiels que présentent la confrontation des idées, des personnes, des peuples, des cultures et se remémore souvent le proverbe wolof « il n’y a pas des gens qui ne s’entendent pas, il n’y a que des gens qui n’ont jamais discuté ».
La seconde partie est quant à elle de nature futuriste, Arfang se rêve anthropologue et archéologue dans un futur non datable, sur une nouvelle planète, s’adonnant à la quête de l’histoire du passé. Dans ce contexte, il présente le fruit de ses recherches en reconstitution historique sur les démarches participatives qui avaient été imaginées avant que les hommes ne soient contraints de quitter la Terre. Partant de la pensée de René Descartes, « plus on en parle, moins on en fait » Arfang déconstruit la logique programmatique, les conseils de quartiers, les rencontres entre élus et citoyens qu’il considère comme des terrains de jeu de cartes dont les meilleures, y compris le joker, sont entre les mains des décideurs. Il en découle une analyse des modalités d’élaboration des projets participatifs présentée selon quatre modèles fondés sur un binôme constitué d’un type de relations et d’une façon de considérer les personnes concernées : « sur – cobayes », « pour – usagers », « avec – acteurs » et « par – auteurs ». Les questions du développement durable, les tensions entre culture, art et démocratie, les enjeux du nomadisme et de la sédentarité, de l’indigène et de l’allogène sont ensuite discutés dans une perspective de confirmation de la pensée de Paolo Freire : « personne de sait tout ni personne n’ignore tout, personne n’éduque personne, personne ne s’éduque seul, les hommes s’éduquent entre eux par la médiation au monde. » Arfang conclue son propos en référence à trois alternatives construites dans une pensée d’éducation populaire renouvelée considérant la culture comme un ensemble de procédures d’attribution de sens à la vie sociale. Ces trois alternatives sont classées en trois domaines de recherche, d’audace et de créativité, celui de la rétrospective critique, celui de l’expérimentation anticipatrice et celui de l’anthropologie du futur. Alors que la dimension romanesque de l’ouvrage s’arrête ici, Alors qu’Arfang s’efface au profit de Cheikh Sow, ce dernier poursuit son travail réflexif par une dizaine de pages présentant quelques principes et idées qui l’accompagnent pour enclencher et animer une démarche participative.
Si l’auteur se fait, par l’intermédiaire de son propos, passeur et nous invite à agir, je vous invite quant à moi à la lecture captivante et réflexive de cet ouvrage tout autant singulier qu’universel.

Luc

Ce n'est pas parce qu'on a plusieurs exercices expérimentaux dans un domaine qu'on en a de l'expérience. Pour que ces expériences soient UNE EXPÉRIENCE, il faut qu'elles servent au bénéficiaire d'en tirer une/des leçons à apprendre, de façon pragmatique, à des personnes partageant ou pas le même domaine d'activité.
Voici en substance ce que Cheikh Tijaane Sow a su faire, à travers "Plus on en parle moins on en fait", de ses nombreuses expériences professionnelles (la culture, la musique, le militantisme associatif) et académiques. Un large mélange de divers champs de domaine de la vie desquels Cheikh a su faire jaillir un produit à la fois pédagogique et "divertissant".
A travers le personnage d'Arfang, il arrive à montrer qu'on doit briser nombre de clichés reçus, en tout c'est la lecture que j'en ai faite quant aux capacités des africains de faire preuve de créativité et d'inventivité.
Qui aurait cru que le concept de démarche/démocratie participative est non pas théorisé, mais vécu et pratiqué dans un tout petit pays d'Afrique comme le Sénégal bien avant les puissances occidentales.
Alors contrairement à ce qui se dit tout n'est pas à faire dans le continent noir. Au contraire, il a des acquis à donner "aux géants du monde". D'où d'ailleurs la surprise d'Arfang au fond de cette salle dans laquelle on passe des heures à parler de choses qu'il a vécues dès son plus jeune âge dans le quartier des HLM de Dakar.
Merci encore Cheikh pour ce chef-d’œuvre que j'aimerais tant que les jeunes sénégalais et africains lisent afin d'avoir le dessus sur ce complexe qui nous mine tant.

Mamadou Diop

 



 
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